Pour faire face à l’épidémie mondiale de COVID 19, un état d’urgence sanitaire a été déclaré en France.
Le texte voté par le parlement prévoit une durée de deux mois à compter de sa publication le 24 mars 2020. (1) L’article 3 du décret pris en application de cette loi interdit tous déplacements, sauf dans des cas bien définis et muni d’une attestation de déplacement dérogatoire, sous peine de sanction pouvant aller jusqu’à une condamnation à 6 mois de prison en cas de violation réitérée.
Plusieurs ménages français vivent de contrats précaires de type temporaires et d’intérims. De plus, les salariés sous chômage partiel pourraient connaître en moyenne une baisse de revenu de près de 15%.
Ainsi, même si les conséquences de cette crise sur l’activité économique de certaines entreprises, indépendants et commerçants s’avèrent désastreuses, les particuliers n’en demeurent pas moins impactés.
La situation peut être d’autant plus préjudiciable eu égard aux données d’endettement des ménages français.
Il ressort en effet de l’enquête typologique publiée par la Banque de France qu’en 2019, 143.080 situations ont été soumises aux secrétariats des commissions de surendettement de France métropolitaine, dont plus de 94% considérées recevables.
Les femmes sont particulièrement exposées au surendettement, percevant des revenus très souvent inférieurs à ceux des hommes.
Quatre fois plus souvent chef de famille monoparentale, elles représentent 55% des débiteurs et codébiteurs se situant dans les tranches d’âge les plus touchées par le surendettement, à savoir de 25 à 54 ans.
L’endettement global contracté par l’ensemble des ménages surendettés dont la situation est considérée ou jugée recevable s’élève à 6,1 milliards d’euros.
Dans les ressources cumulées des situations de surendettement recevables en 2019, les revenus d’activité comptent pour 53,7% et, la part des pensions et des revenus du patrimoine respectivement de 18,9 % et 0,3 %.
36 % des ménages surendettés disposent de ressources mensuelles nettes inferieures au SMIC mensuel. (2)
Il est donc capital d’avoir les bons réflexes pour pouvoir réagir en cas de difficulté à faire face aux échéanciers de crédit à la consommation durant cette période inédite.
À titre liminaire, il convient de rappeler qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut obtenir la déchéance du terme et en conséquence exiger le remboursement de l’intégralité du capital restant dû, outre des indemnités sanctionnant cette défaillance.
L’ordonnance n° 2020306 du 25 mars 2020 a pour objet principal de proroger des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire. (3)
L’article 4 de ce texte prévoit notamment que les clauses pénales, les clauses résolutoires ainsi que les clauses prévoyant une déchéance, lorsqu’elles ont pour objet de sanctionner l’inexécution d’une obligation dans un délai déterminé, sont réputées n’avoir pas pris cours ou produit effet, si ce délai a expiré entre le 12 mars et le 24 juin 2020.
En application de cette disposition, le prêteur ne saurait se prévaloir d’une déchéance du terme pour non-respect par l’emprunteur des échéanciers entre le 12 mars et le 24 juin 2020.
Même si plusieurs établissements de crédits ont d’ores et déjà pris la décision d’accorder d’office ou sur demande une suspension des échéances de crédit pendant cette période, il est recommandé de prendre l’initiative d’exposer à son créancier ses difficultés afin de négocier un report ou une suspension, du moins pour le capital et intérêt.
Si ce dernier s’oppose à une telle demande, il est indispensable de prendre connaissance de l’intégralité des clauses prévues dans le contrat de crédit, ce dernier prévoyant parfois des stipulations permettant au débiteur de déroger à titre exceptionnel à ses obligations.
En l’absence de telles stipulations dans le contrat de crédit, il faudra envisager la saisine du Juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire à l’issue de la période de confinement, aux fins d’obtenir des délais de paiement.
En effet, Selon les dispositions de l’Article 1343-5 du Code civil, « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues ».
Une telle décision relevant de l’appréciation souveraine des juges, la bonne foi de l’emprunteur sera à cette étape très déterminante.
Par ailleurs, il convient de souligner que, le créancier qui réclame l’exécution d’un contrat doit établir la régularité de celui-ci au regard des textes d’ordre public de la consommation.
Devant le Tribunal, il est alors judicieux de prétendre également à une réduction de cette dette, en soulevant les éventuelles défaillances de l’établissement de crédit.
C’est le cas lorsqu’il n’a pas fourni au souscripteur du crédit une information complète notamment en lui accordant un délai de réflexion, lui fournissant le contrat de prêt original, le double de la notice d’assurance, la double fiche d’information précontractuelles ou s’il n’a pas vérifié de façon sérieuse la solvabilité de ce dernier.
La défaillance du créancier peut alors conduire le juge à prononcer la déchéance du droit aux intérêts.
Lorsque le prêteur est déchu de ce droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu.
Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts sont donc restituées à l’emprunteur ou imputées sur le capital restant dû.
En tout état de cause, si vous rencontrez actuellement des difficultés à régler vos échéances de crédit, il est fortement recommandé de prendre attache avec votre conseil habituel, ce dernier pouvant dès à présent prendre toute mesure utile à la défense de vos intérêts.
1. LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19
2. Le surendettement des ménages, Enquête typologique 2019 Banque de France
3. Ordonnance n° 2020¬306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période